[Editorial] De Ptolémée à Copernic

Ptolémée à Copernic
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Mais où va donc la France ? Vieux pays d’un vieux continent, fatigué mais aux prétentions toujours universelles quand bien même globalisation et vagues technologiques fissurent son modèle économique et social ? Ou bien exemplaire bastion d’un « vivre ensemble», idéalisé parce que conjuguant laïcité et solidarité alors même que communautarisme, chômage, déficits sont partout à l’oeuvre ?

Mais où va donc la France ? Repli sur un passé harmonieux autant que glorieux et gravé dans le marbre ou rupture avec celui-ci, toute voile gonflée par le vent de la flexisécurité et de la modernité ?

Mais où va donc la France ? L’invective deviendrait-elle le fondement de nos débats, le dos à dos la seule posture dans nos échanges, les primaires l’alpha et l’oméga de notre vie politique ?

Mais où va donc la France ? Les observateurs internationaux se posent la question et depuis deux ou trois ans – élections après élections, grèves après grèves, attentats après attentats– les Français se la répètent en boucle.

Écartelée entre souverainistes et mondialistes, communautaristes et individualistes, partisans du Tout État et libéraux… les partis comme la société française paraissent choisir… de ne pas choisir.

Mais où va donc la France ? Notre pays est désormais à la croisée des chemins, là où se joue le destin des Nations et des Hommes, là où chacun et toute collectivité se décident sur sa manière d’être au Monde… Or, deux lois nouvelles paraissent régir aujourd’hui nos rapports sociaux : celle dite de Khaled Freak et celle du syndrome de Carter, deux lois qui résument et fondent notre particularité ou – pour le dire avec un peu d’humour – notre «French touch». La première porte le nom d’un artiste amateur – originaire de La Ciotat – et qui reprenant une anaphore rythmant un échange à l’Assemblée nationale, en a fait un remix à succès vu par prés d’un million d’internautes. Thème: ce n’est pas de notre faute, mais de la vôtre… l’incantation y remplace la démonstration, l’ironie le raisonnement, et l’accusation de l’autre le sens de ses propres responsabilités ; accentuant si besoin était le décalage entre Élite et Peuple.

La Loi de Khaled Freak s’énoncerait ainsi – sur un air de «world music »–: « ceux que nous avions précédemment élus n’ont pas réussi, ceux que nous venons d’élire sont incapables de nous diriger, et ceux qui ont le pouvoir nous ne les élisons pas car ils ne résident pas chez nous. Alors pourquoi voter ou s’impliquer dans la société ? Quant à la seconde loi, elle est une sorte de corollaire de la première, à trente-cinq ans de distance et d’Océan. On se souvient que la présidence de Jimmy Carter (1977-1981) avait été marquée par un chômage élevé et des grèves – fait rare aux États-Unis – bien que les succès internationaux fussent au rendez-vous. Et l’exécutif américain avait perdu la confiance de l’opinion, devenant en quelque sorte « hors système», expression apparue pour caractériser autant la procrastination des autorités que leur incapacité à proposer ou faire accepter un cap à la société. Les sondages comme les postures le démontrent aisément : la Loi Carter d’un gouvernement hors système s’applique parfaitement à la France d’aujourd’hui. Alors pourquoi voter ou s’impliquer dans la société ? Et le cumul de ces deux lois dans un contexte d’hystérésis est la matrice d’une crise à venir, institutionnelle autant que sociétale. N’est-il donc pas temps – comme en 1958– de réécrire les conditions de notre « vouloir vivre ensemble» ? Et ce qui est vrai pour notre pays ne l’est-il pas pour l’Europe – particulièrement après le Brexit (près de 52 % des voix), comme pour le Monde – sous les coups de butoir du terrorisme et de l’ubérisation ? Oui, vers quoi allons-nous ? En France, en Europe, dans le Monde ?

C’est afin de prendre en compte ce questionnement que nous avons rassemblés compétences et moyens autour de Parlements et Politiques Internationales, nouvelle formule éditoriale de nos analyses et réflexions. C’est afin de faciliter l’émergence de solutions que nous avons mis en place un Comité de Rédaction à même de porter cette Revue. Constater que nous sommes à la croisée des chemins ne suffit pas, encore faut-il être force de propositions, éclairer l’avenir en mettant à disposition une plateforme –papier et numérique – pour que parlements nationaux et acteurs ou observateurs des politiques internationales expriment leurs stratégies et leurs idées. Constater que le système ptoléméen des États-Nations est en crise et risque de disparaître ne suffit pas, encore faut-il décrypter les contours de la nouvelle révolution copernicienne de nos organisations politiques : s’agira-t-il d’un cosmopolitisme doté d’une gouvernance humaniste et réelle ; ou bien les forces centripètes l’emporteront-elles jusqu’à faire éclater nos sociétés et créer autant d’États que d’espaces identitaires, impuissants face aux GAFAM et autres multinationales ou ONG de toute nature – caritative aussi bien que mafieuse ? Oui, tel est le coeur du débat, telle est notre ligne éditoriale. Alors, que les contributions réunies ici, comme celles de nos prochains numéros, permettent à chacun de passer – enfin – de Ptolémée à Copernic… et aux Hommes porteurs du nouveau modèle humaniste – les coperniciens – de se rassembler pour faire émerger sur le plan économique et politique le même mouvement que celui effectué par nos illustres prédécesseurs sur le plan astronomique…

Jean-Claude Fontanive

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